Bleu, la couleur "Roi"
Détesté avant d’être adulé, il a traversé les époques en changeant d’emploi comme de sens. Comment passe-t-on du désintérêt au triomphe ? De quelle sémantique le bleu est-il porteur aujourd’hui ? Retour sur l’épopée d’une couleur bien plus complexe qu’il n’y paraÎt !
Une couleur mal aimée
Par le passé, le bleu n’a pas toujours été le favori. Dans l’antiquité, alors qu’il a la cote en Égypte, les romains, eux, le détestent et le considèrent comme vulgaire. Pourquoi ? Parce que les barbares celtes et les vikings s’en servaient comme peintures de guerre. C’est le rouge qui arrive alors en première position, aux cotés du blanc, du noir et du jaune.
De la vulgarité à la divinité
Petit miracle pour le bleu, un siècle plus tard, il est associé à la divinité. Il est notamment lié à la lumière divine, aux cieux et au manteau de la Vierge Marie. Les nobles s’en emparent alors. Après tout, ce sont eux les commanditaires des peintures, et ils veulent en avoir pour leur argent. Parce qu’il s’agit bien ici d’une histoire d’argent… Les pigments indigo et le bleu outre mer coûtaient à l’époque plus cher que l’or, à cause des matériaux dont ils étaient extraits. Le bleu, plus cher, donc plus sophistiqué, acquiert alors ses lettres de noblesse et devient la reine des couleurs.
La couleur des Rois
Déjà adulé par les nobles (les fameux sangs bleus), le bleu monte jusqu’aux plus hautes sphères en devenant la couleur des Rois. On parle d’ailleurs du bleu roi et même de bleu de France. Louis XIV le portera d’ailleurs sur son costume de sacre, agrémenté de fleurs de lys.
Le bleu devient alors politique et passe des armoiries aux uniformes militaires. Au delà de l’élégance, il devient alors synonyme de rigueur, de droiture et d’honneur.
La démocratisation du bleu
Le bleu résistera à la fin de la monarchie et restera à la mode de nombreuses années. À la fin du 19ème siècle, le bleu de travail voit le jour et devient LA tenue des ouvriers. Plus tard, dans les années 70, la création du Blue Jeans finit de faire du bleu la couleur universelle par excellence. Il est, en effet, aussi bien porté par les classes les plus élevées que par les plus populaires.
Une symbolique plus terre à terre
Au delà de ses connotations sociales, le bleu c’est aussi l’évocation de choses apaisantes comme l’eau, l’air, le ciel, l’espace, la nuit… Il est donc souvent utilisé pour renvoyer une image pure, naturelle, sereine et calme. Cela en fait une couleur fédératrice. Si un tiers des marques mondiales utilisent du bleu c’est d’ailleurs pour sa popularité.
Pourquoi choisir le bleu pour sa marque ?
Vous rappelez-vous cette tirade de Meryl Streep sur le bleu céruléen dans Le Diable s’habille en Prada ? Elle explique à son apprentie tout l’historique de la couleur pour en justifier l’utilisation pour un pull over. Si cette justification est purement fictive, il n’en est pas moins que la logique est infaillible. Ce n’est pas un hasard si le bleu est très souvent utilisé par des marques de services, des associations ou des institutions qui souhaitent rassurer et fédérer.
Beaucoup de marques de cosmétiques, comme Nivea, utilisent le bleu notamment pour sa symbolique de propreté et de pureté. Pour Ford, on parle d’un dégradé de bleu plus foncé et comme illuminé sur le dessus. On retrouve ici les attributs nobles du bleu plus profond. Et pour trois des plus grands réseaux sociaux ? Pour Facebook, on sait qu’il est dû au daltonisme de Mark Zuckerberg mais pour Twitter et Linkedin il s’agit bien d’inspirer confiance aux utilisateurs : n’oublions pas que le bleu fut un temps une couleur royaliste et militaire qui amène, avec elle, des idées d’ordre, de sérieux et de rigueur.
N’oublions pas que le bleu fut un temps une couleur royaliste et militaire qui amène, avec elle, des idées d’ordre, de sérieux et de rigueur.